Grâce à un fidèle ami et grand spécialiste en la matière, Côté Soleils s’enrichit d’une nouvelle rubrique « A chaque recette son vin ». Désormais, vous allez être in-col-la-ble sur les accords mets-vins !
Après avoir parcouru le monde et passionné d’œnologie, Philippe Catz s’est posé pour créé en 1996 Vinissime puis, insatiable, l’AfterBulles en 2018. De fabuleuses aventures humaines, dans le seul but de partager et transmettre sa véritable passion pour des Vins du monde entier et pour le Champagne auprès de néophytes. Son atelier est à son image. Chaleureux, convivial, où chaque passant peut s’arrête pour l’écouter jouer à la guitare et chanter sur des airs de bossa, quand il n’enseigne pas, ou ne donne pas un concert sur ses airs brésiliens préférés. Un artiste sur de nombreux points, comme l’emplacement qu’il a choisi pour s’installer, au pied de la Butte aux Cailles – un quartier bohème que j’affectionne tout particulièrement, composé d’artistes, de nombreux artisans, … et d’une multitude de petits restaurants.
De par son expérience, il saura vous transmettre, lors de ses ateliers, des principes fiables et simples à mettre en œuvre à chaque dégustation. Des règles élémentaires mais indispensables, qui vous serviront notamment de base à une décision d’achat chez un vigneron ou un caviste.
Lors de ses cours, Philippe vous fournira des repères gustatifs qui vous permettront de savoir pourquoi on aime ou pas tel vin, ce qui fait son harmonie, sa plénitude ou au contraire s’il est déséquilibré, identifier la source de ce déséquilibre du côté de l’alcool, du gras, de l’acidité, du sucre trop ou pas assez présents.
Enfin, il vous fera comprendre les associations de textures mets et vins, dictées par le style du vin, sa simplicité ou sa complexité… plus que par ses arômes qui dictent trop souvent la cuisine ou l’inverse.
Pour Côté Soleils, mon œnologue favori s’est très gentiment plié au jeu de vous divulguer ses conseils d’expert, pour vous permettre de mettre de côté ce moment tant redouté du choix du vin au restaurant ou lors d’un dîner que vous organisez dans votre Home Sweet Home.
Désormais, en respectant les 10 principes cités ci-dessous, choisir un vin va devenir un véritable plaisir. Vous ne commettrez plus d’erreur de goût. On le sait tous, choisir un vin inadapté peut gâcher votre plat, mais également renforcer l’acidité, l’amertume, le salé ou sucré du plat et appauvrir le vin, le rendre insipide ou lui conférer un mauvais goût. Au contraire, un vin sélectionné avec soin, va relever tel ou tel aspect du plat, qui à son tour va révéler tel autre trait de caractère ou goût du vin. Un bon choix peut même créer une spirale gustative, enchanter le plat qui à son tour enchantera le vin et ce à l’infini.
Neuf principes portent sur les associations elles-même. Le dixième concerne la température de service de votre vin et le carafage / décantage.
10 principes à respecter
1er principe : Au cours d’un repas si vous servez plusieurs vins, commencez toujours par le plus désaltérant, donc peu alcoolisé et plus acide pour aller vers le plus puissant ou le plus doux (sucré). L’acidité du vin va exciter notre palais, nous faire saliver et ouvrir l’appétit (apéritif vient du latin « aperire » qui veut dire ouvrir).
2ème : Déterminez la région dans laquelle vous allez réaliser vos associations. Restez si possible dans la même région des mets et du vin ou le même bassin viticole. On appelle cela les « associations de terroirs », ce sont les meilleures et bien souvent, elles évitent les migraines.
En France existent trois grandes régions (ou bassins viticoles) :
– Le Grand Est : Alsace, Bourgogne, Champagne Jura, Moselle, Savoie
– Le Sud Est : Corse, Languedoc-Roussillon, Provence, Vallée du Rhône
– Le Grand Ouest : Bordeaux, Sud Ouest et Vallée de la Loire
A chaque bassin peuvent être associés des aliments, par exemple : légumes de Touraine, Rougets de la Méditerranée, volailles de Bresse, viandes de Charolais, fromages d’Auvergne… et où l’on trouve des vins correspondants.
Exemple d’un repas Grand Est : commencez par un Champagne à l’apéritif avec des gougères, servez un blanc de Savoie sur l’entrée de crudités ou un poisson de rivière ou de lac, un rouge de Bourgogne sur le plat de viande, un blanc du Jura sur des fromages de la famille des pâtes pressées ou chèvres et un Alsace vendange tardive de Gewürztraminer sur les îles flottantes et ce, sans risquer de provoquer des migraines ou indigestions. Mais alors si on cuisine chti on fait comment ? Dans la partie Nord de la France, il n’y a pas ou plutôt presque pas de vignes (sauf en Normandie à St Pierre sur Dives et sur un Terril ou deux dans le département du Nord). Avec les Maroilles et autres boulettes d’Avesnes, on optera pour une bière artisanale locale ou un Côtes de Toul ou de Moselle rouge. En Normandie avec le camembert, essayez le Cidre ou le Calvados.
3ème – sur les amuse-bouches (crudités, gougères, petits feuilletés) restez « soft » avec un Champagne, un Crémant, un blanc sec ou en été un joli rosé.
4ème – sur les entrées, servez un blanc sec qui épousera très bien les crudités en été, les consommés ou potages en hiver, les fruits de mers, mais aussi les crustacés ou le foie gras (pour ces derniers le blanc sera plus charnu, plus gras et goûteux).
Sur le foie gras mariné, mi cuit ou cuit, les blancs demi-secs sont les meilleures associations. On en trouve en Alsace, Loire et Sud Ouest essentiellement. Essayez d’associer le foie gras avec le région du vin ou réciproquement.
5ème – sur les plats, souvent plus protéinés (poissons, viandes blanches ou rouges, volailles), servez de façon très générale un blanc sur les poissons, les viandes blanches et un rouge sur les viandes rouges.
6ème – sur les plats encore, ce principe vient compléter et préciser le précédent. Il s’agit d’évaluer la texture plus ou moins serrée de votre viande ou poisson, et la puissance gustative générale de votre plat.
– Sur un plat de poisson, de viande blanche, une volaille avec une sauce relevée, épicée, n’hésitez pas à rester sur le blanc, mais plus chaleureux du Sud Est par exemple, type Vallée du Rhône septentrionale.
– Sur une viande rouge relevée, ou une tajine, un couscous royal, orientez votre choix vers les vins plus alcoolisés du sud : Languedoc, Roussillon, Rhône méridional type Châteauneuf du Pape.
– Sur du veau ou une volaille ou une daube, remontez vers le nord avec un rouge léger en alcool et peu tannique (Anjou, Beaujolais, Bugey, Savoie), voire un blanc sec mais plus généreux que celui de l’entrée (Bourgogne ou Jura).
– Si vous proposez une viande dense (canard, mouton, gibier à poils), servez un vin dense, c’est à dire plus tannique (Bordeaux, Sud Ouest).
7ème – sur les fromages ? Quitte à enlever une idée reçue et bien encrée dans nos têtes de gaulois, le fromage c’est d’abord le blanc !
3 des 5 familles fromagères artisanales se marient avec les blancs secs ou plus sucrés : les pâtes pressées mi-cuites (Abondance, Appenzell, Beaufort, Emmental, Gruyère Suisse, tomes de montagne), les chèvres avec les blancs secs et les pâtes persillées avec les blancs liquoreux.
Sur les autres familles, les rouges peu tanniques seront d’excellents compagnons (un Brie de Meaux ou un Coulommiers avec un Beaujolais Village font très bon ménage).
Ensuite la meilleure association ici est celle de terroir. Un chèvre de Loire (Ste Maure, Celles sur Cher) avec un Chinon blanc ou un Sauvignon de Touraine, un Comté fruité avec un Côtes du Jura, un Roquefort avec un Jurançon moëlleux.
Et si vous avez plusieurs familles de fromage sur votre plateau, le plus petit dénominateur commun sera le Gamay de Loire ou de Beaujolais, ou le Pinot Noir.
8ème – sur les desserts ?
Avec un dessert à base de fruits (salade de fruits, tarte ou entremet), un blanc moelleux fera l’affaire.
Pour un dessert aux fruits rouges (entremet ou tarte peu sucrée), on peut tenter l’association avec un Beaujolais rouge ou un vin effervescent rouge de Loire ou d’Italie (Lambrusco) qui fera ressortir le côté doux et acidulé des fruits.
Pour les desserts au chocolat, les vins doux naturels du Sud Ouest sont parfaitement adaptés : Banyuls, Maury, Rivesaltes ambré…
9ème – choix d’un seul vin sur tout le repas de l’apéritif au dessert ?
Si vous souhaitez vous simplifier la vie et ne consacrer qu’un petit budget au vin, optez pour un vin rouge peut tannique, issu du cépage Gamay (Loire, Beaujolais), Poulsard (Jura), à la rigueur un Pinot Noir du Nord de la Bourgogne (Irancy ou Epineuil).
Ce vin pourra être dégusté sur votre apéritif (de préférence charcuterie), votre entrée de poisson, votre plat de viande, vos fromages et même votre dessert (à base de fruits rouges, salade de fraises, framboises ou tarte avec les mêmes fruits).
10ème principe :
La température
– Blancs : Plus le vin est jeune et acide plus il doit être servi frais (4-8 °C), non pour en masquer les défauts comme dans certains restaurants de seconde zone, mais pour renforcer la vivacité du vin – surtout les vins à base de Sauvignon et les Rieslings.
Au contraire, plus le vin est gras et complexe plus la température doit être élevée (8 à 14°C) – les champagnes, les Chardonnays de Bourgogne, les vins du Jura à base de Savagnin et Chardonnay.
– Liquoreux : Il s’agit des vins blancs sucrés, ici la fraîcheur s’impose, mais le vin doit être servi à une température idéale de 8 °C pour ne pas masquer les arômes, souvent riches, du vin.
– Rouges : Plus les vins sont tanniques, plus la température doit être élevée, car le froid renforce le côté acide et durcit les tanins, ce qui peut déséquilibrer le goût d’un vin au départ excellent. On servira donc un Beaujolais ou un Gamay de Touraine à 15 °C, un Pinot Noir de Bourgogne ou d’Alsace à 16/18 °C, un Bordeaux à 18 °C et un Madiran à 20 °C.
Attention, il s’agit de température de service. La température de dégustation (c’est à dire au moment où vos convives portent le verre aux lèvres pour déguster), le vin a pu se réchauffer d’un ou plusieurs degrés, surtout l’hiver dans nos appartements surchauffés ou évidemment en plein été sur une terrasse. Il est donc préférable de servir à un ou deux degrés de moins aux températures indiquées ici.
Le carafage : c’est transvaser un vin sans ménagement de son contenant d’origine (la bouteille) dans une carafe pour l’oxygéner, le révéler.
Rouges : On peut carafer tous les vins rouges jeunes, surtout s’ils sont complexes (Bourgogne, Bordeaux, Sud-Ouest, Vallée du Rhône septentrionale) pour en assouplir les tanins et révéler les arômes. Plus le vin est jeune et tannique plus le temps de carafe doit être long.
Bordeaux, Provence, Languedoc-Roussillon : 2 à 24 heures de carafe suivant appellation Bourgogne, Languedoc-Roussillon, Vallée du Rhône : 2 heures Gamay du Beaujolais, Trousseau du Jura : 20 ‘ à 1 heure.
Blancs et champagnes : On peut carafer certains vins blancs complexes pendant quelques dizaines de minutes pour les révéler plus vite. On peut également carafer un grand Champagne avec un certain nombre de précautions pour éviter de « casser » les bulles.
Décanter, c’est la même opération de transvasement, mais très lentement et méticuleusement pour séparer les parties solides en suspension dans le vin, du liquide lui-même.
Pham
Grâce à ce condensé, maintenant je sais un peu mieux accorder les mets et les vins, et surtout voir les erreurs commises.
Merci Philippe !
JPierre P